1.4.3. Résumé & Compréhension

Résumé des « stades » de développement de la reconnaissance des mots écrits

Les trois « stades » majeurs de l’apprentissage de la lecture sont:

Le stade logographique ou de pré-lecture

Certains mots sont reconnus comme des entités entières, à savoir comme des dessins ou des photos, sur base de leurs caractéristiques visuelles saillantes et de leurs couleurs.

Le stade alphabétique menant au système de décodage

A ce stade, l’enfant développe des représentations des « sons » et des « lettres », qui lui permettent de décoder les mots écrits en trois étapes :

  1. Le mot est divisé en ses « lettres » constitutives
  2. Chaque « lettre » est associée à son « son » correspondant
  3. Les « sons » sont assemblés pour former la prononciation du mot

Le stade orthographique menant au système d’accès direct

A ce stade, l’enfant construit progressivement des représentations complètes et organisées des mots écrits (représentations orthographiques) et des mots parlés (représentations phonologiques), qui sont mises en correspondance.

Ceci permet de reconnaître automatiquement les mots écrits et d’accéder directement à leurs prononciations complètes.

Nous avons présenté les « stades » de la mise en place des processus d’identification des mots, mais cette notion de « stades » séparés, comme si chaque stade devait être complété avant que l’enfant n’accède au suivant, est une simplification excessive.

En fait, on considère plutôt que le développement progressif de représentations orthographiques et phonologiques entières et structurées des mots permettant l’accès direct ne se fait pas globalement suivant un « stade » mais se fait mot par mot à différents moments du développement.

Une alternative à la notion de stades: l’auto-apprentissage basé sur le mot (extrait de la thèse de doctorat de Vincent Goetry, 2002)

Comme nous l’avons déjà évoqué à plusieurs reprises, la prise de conscience de la structure phonémique de la parole est essentielle dans le processus d’acquisition de la lecture. Cette habileté permet en effet la mise en place d’un système génératif de traduction de l’orthographe en phonologie, grâce à des associations qui évoluent progressivement vers un assembleur phonologique automatique (Alegria, Leybaert & Mousty, 1994). Ce système génératif joue un rôle dynamique majeur dans l’acquisition de la lecture.

Share et collaborateurs ont proposé un mécanisme susceptible de rendre compte de cette dynamique (Jorm & Share, 1983; Jorm, Share, McLean & Matthews, 1984; Share, 1995, 1999). Le recodage phonologique fonctionnerait en effet comme un mécanisme d’auto-apprentissage permettant à l’enfant (et à l’adulte) d’acquérir des représentations orthographiques de plus en plus détaillées des mots rencontrés. La notion d’auto-apprentissage implique que chaque décodage correct d’un mot non familier va d’une part renforcer le système d’assemblage en le rendant de plus en plus automatique et sophistiqué, et d’autre part contribuer à créer progressivement un code orthographique pour ce mot, ce qui permettra un adressage lors de rencontres ultérieures avec le même mot.

La fonction d’auto-apprentissage que joue le recodage phonologique comporte trois caractéristiques essentielles. Premièrement, l’auto-apprentissage des représentations orthographiques se fait item par item et non en stades. En d’autres termes, la procédure de traitement appliquée à chaque mot dépend à la fois de la fréquence d’exposition à ce mot et du succès du recodage phonologique effectué lors des rencontres précédentes avec ce mot. L’acquisition rapide d’informations orthographiques spécifiques à un mot particulier (Manis, 1985, Reitsma, 1983, Share, 1999) permettrait d’utiliser une procédure d’adressage, accompagnée un traitement phonologique minimal, dès les premières étapes de l’acquisition de la lecture.

Deuxièmement, la notion d’auto-apprentissage suppose que le recodage phonologique se “lexicalise” progressivement au cours du développement de la lecture. Au départ, l’enfant ne pourra effectuer qu’un recodage partiel basé sur l’exploitation d’un ensemble limité de correspondances graphème-phonème (voir par exemple Ehri & Wilce, 1985; Ehri & Sweet, 1991). Ces connaissances rudimentaires vont progressivement s’enrichir et se modifier à la lumière des contraintes lexicales imposées par le développement des connaissances orthographiques, qui vont induire l’élaboration de règles de correspondance intégrant des contraintes contextuelles, positionnelles et morphémiques dans le recodage. Cette lexicalisation aura pour conséquence que chez le lecteur habile, la connaissance des relations qui unissent l’écrit et l’oral a évolué de telle manière qu’elle ne peut plus être distinguée d’un mécanisme purement lexical qui ne prend pas en considération les règles de correspondances grapho-phonologique au niveau sous-lexical. Share (1995) insiste également sur le fait que l’auto-apprentissage par recodage phonologique s’applique aussi aux mots irréguliers. En effet, la plupart des mots irréguliers présenteraient suffisamment de correspondances régulières (en particulier pour les consonnes) pour permettre la sélection d’une cible adéquate parmi un ensemble de prononciations possibles, en particulier lorsque ces mots sont présentés en contexte, ce qui est généralement le cas à l’école. Dans cette perspective, le contexte jouerait donc un rôle essentiel.

Troisièmement, le recodage phonologique constitue la condition sine qua non d’acquisition de la lecture pour tous les enfants. Le développement des représentations orthographiques dépend essentiellement et principalement du bon fonctionnement de la procédure de recodage phonologique. Les différences individuelles importantes de la capacité à stocker et récupérer les informations orthographiques spécifiques aux mots, influencent la vitesse d’acquisition des représentations orthographiques ainsi que la qualité de ces représentations. Néanmoins, dans la perspective du mécanisme d’auto-apprentissage, les processus visuo-orthographiques sont considérés “non comme une seconde source de variance, mais comme une source secondaire de différences individuelles dans l’acquisition de la lecture” (Share, 1995, p. 156).

Une prédiction essentielle de la théorie d’auto-apprentissage est que des difficultés dans la mise en place de mécanismes efficients de recodage phonologique devraient compromettre le développement de l’ensemble du système, y compris celui des représentations orthographiques. Plusieurs études fournissent des résultats compatibles avec cette prédiction. Par exemple, Jorm et al. (1984) ont réparti des enfants de première primaire en sous-groupes de “bons décodeurs” et “mauvais décodeurs” selon leurs performances de lecture de pseudo-mots (ne pouvant être traités par voie lexicale). Les deux sous-groupes étaient appariés en termes d’âge, de sexe, de quotient intellectuel verbal, d’écoles et de niveau global de lecture de mots. Une évaluation longitudinale de leurs performances de lecture a montré qu’après deux ans, les “bons décodeurs” dépassent de 9 mois en âge de lecture les “mauvais décodeurs”. Conformément à l’hypothèse d’auto-apprentissage, les premiers ont donc développé de meilleures compétences en lecture que les seconds (voir aussi Share, 1999, pour un test plus direct de l’hypothèse d’auto-apprentissage).

Une étude longitudinale menée par Byrne, Freebody et Gates (1992) corrobore plus élégamment la notion d’auto-apprentissage. Ces auteurs ont suivi dés la première primaire et pendant quatre ans des enfants qui ont été répartis en quatre groupes en fonction de leurs performances de lecture de mots irréguliers (mettant en jeu l’accès orthographique au lexique) et de pseudo-mots (évaluant les capacités de recodage phonologique). Les deux premiers groupes comportaient les enfants qui présentaient des performances homogènes aux deux épreuves (“bons lecteurs” ou “mauvais lecteurs”), le troisième groupe comportait les enfants qui avaient obtenu de meilleures performances en lecture de mots irréguliers qu’en lecture de pseudo-mots (les “chinois”), et le quatrième groupe comportait les enfants qui étaient meilleurs pour les pseudo-mots que pour les mots irréguliers (les “phéniciens”, voir Baron, 1977, pour l’introduction de ces termes en référence au modèle à double voie ). Les résultats d’épreuves de lecture de mots réguliers et irréguliers ainsi que pseudo-mots et de compréhension passées au cour des années suivantes montrent que les performances des “chinois” se sont détériorées dans tous les tests, alors que celles des “phéniciens” se sont améliorées, y compris pour les mots irréguliers. Ces différences sont attribuées au fait que seuls les “phéniciens” possèdent un mécanisme génératif d’identification des mots qui va continuer à se développer et qui va permettre l’acquisition d’informations orthographiques spécifiques aux mots rencontrés y compris pour les mots irréguliers (Share, 1995).

References

Alegria, J., Leybaert, J., & Mousty, P. (1994). Acquisition de la lecture et troubles associés : évaluation, remédiation et théorie. In J. Grégoire & B. Piérart (Eds.), Evaluer les troubles de la lecture : les nouveaux modèles théoriques et leurs implications diagnostiques (pp. 105-126). Bruxelles: De Boeck-Wesmael s. a.
Baron, J. (1977). Mechanisms for pronounciation printed words: Used and acquisition. In D. L. S. J. Samuels (Ed.), Basic processes in reading: perception and comprehension. Hillsdale, NJ: Erlbaum.
Byrne, B., Freebody, P., & Gates, A. (1992). Longitudinal data on the relations of word-reading strategies to comprehension, reading time, and phonemic awareness. Reading Research Quarterly, 27, 141-151.
Ehri, L., & Sweet, J. (1991). Fingerpoint-reading of memorised text: What enables beginners to process the print? Reading Research Quarterly, 26, 442-462.
Ehri, L., & Wilce, L. (1985). Movement into reading: Is the first stage of printed word learning visual or phonetic? Reading Research Quarterly, 20, 163-179.
Jorm, A., & Share, D. (1983). Phonological recoding and working memory. Applied Psycholinguistics, 4, 103-147.
Jorm, A., Share, D. L., MacLean, R., & Matthews, R. (1984). Phonological recoding skills and learning to read: A longitudinal study. Applied Psycholinguistics, 5, 201-207.
Manis, F. R. (1985). Acquisition of word identification skills in normal and disabled readers. Journal of Educational Psychology, 77, 78-90.
Reitsma, P. (1983). Printed word learning in beginning readers. Journal of Experimental Child Psychology, 36, 321-339.
Share, D. L. (1995). Phonological recoding and self-teaching: sine qua non of reading acquisition. Cognition, 24, 139-168.
Share, D. L. (1999). Phonological recoding and orthographic learning: A direct test of the self-teaching hypothesis. Journal of Experimental Child Psychology, 72, 95-129.

Modèles en stades de l’acquisition de la lecture et de l’écriture (extrait de la thèse de doctorat de Vincent Goetry, 2002)

Un modèle d’acquisition de la lecture et/ou de l’écriture se doit d’expliquer comment se développent les procédures d’identification ou de production des mots écrits qui sont supposés être exploités par les lecteurs/scripteurs habiles. La plupart des modèles proposés pour rendre compte de ce développement comportent une série de stades successifs et qualitativement distincts, chacun se développant à partir de la combinaison des connaissances développées au stade précédent et de connaissances nouvelles. Bien que ces modèles aient fait l’objet de nombreuses critiques, ils ont fourni un cadre de référence important pour les recherches effectuées ces quinze dernières années dans le domaine de l’acquisition de la lecture et de l’écriture chez l’enfant.

Bien que les modèles en stades proposés pour rendre compte du développement de la lecture diffèrent en ce qui concerne le nombre de stades considérés et la nature des processus de traitement impliqués à chaque stade, ils partagent l’hypothèse selon laquelle le développement de la lecture et celui de l’écriture se caractérisent par une succession de mécanismes de traitement des mots qualitativement distincts (e. g. Ehri, 1992, 1997, 1998a, 1998b; Frith, 1985, 1986; Marsh, Friedman, Welch & Desberg, 1981; Morton, 1989; Seymour, 1990, 1994). Ces mécanismes peuvent être groupés en trois étapes principales: le stade logographique, le stade alphabétique et le stade orthographique. Les noms de ces trois stades sont empruntés au modèle de Frith (1985), qui est probablement le plus cité.

 

1. Description des principaux modèles en stades d’acquisition de la lecture et de l’écriture

 
a) Premier stade: la procédure logographique

Dans ses premiers contacts avec le matériel écrit, l’enfant apprendrait à “identifier” certains mots à partir de certains traits visuels saillants qui les caractérisent ou les entourent. Cette stratégie correspond à la phase de “discrimination par coup de filet” de Marsh et al. (1981) et Harris et Coltheart (1986), au stade dit “logographique” de Frith (1985, Morton, 1989) et à la phase “pré-alphabétique” d’Ehri (1992). Elle se caractérise essentiellement par le fait que les mots ne font pas encore l’objet d’une analyse linguistique : ni l’identité ni l’ordre de leurs lettres constitutives ne sont prises en considération. C’est pourquoi l’enfant produit des réponses témoignant d’une absence totale de médiation phonologique (e. g. television pour rhinoceros, Seymour & Elder, 1986), et ne remarque pas les substitutions de lettres (e. g. XEPSI est identifié comme PEPSI) si l’allure typique du mot (couleurs, logo, etc.) est respectée, et ce même lorsque son attention est attirée sur la substitution (Masonheimer, Drum & Ehri, 1984).

Morton (1989) insiste sur le fait qu’à ce stade, le traitement visuel des mots implique une sémantique picturale plutôt que verbale. En d’autres mots, tout comme un citron doit être jaune pour être un citron, “coca-cola” doit être écrit en blanc sur fond rouge et dans une calligraphie particulière pour être “coca-cola”. L’accès à la signification des mots écrits est de même nature que l’accès à la signification d’images.

 

b) Deuxième étape: la procédure alphabétique

Tous les modèles en stades s’accordent pour considérer que le développement de la lecture et de l’écriture dans un système alphabétique implique la mise en rapport des lettres ou groupes de lettres (graphèmes) et des représentations d’unités phonémiques correspondantes. Comme nous l’avons décrit au Chapitre III, cette mise en rapport ne peut se faire sans que l’enfant ne développe une capacité à analyser explicitement le courant de parole en phonèmes. Cette capacité est elle-même stimulée par l’apprentissage de l’alphabet, de telle manière que la conscience phonémique et l’apprentissage de la lecture et de l’écriture entretiennent des relations causales bidirectionnelles (Bertelson, 1986; Morais et al., 1979, 1987).

La procédure de lecture qui se développe dès ce moment se caractérise par la prise en considération de l’identité des lettres ainsi que de leur ordre. La terminologie utilisée pour désigner cette étape varie toutefois selon les auteurs: Frith (1985) et Morton (1989) parlent de “stade alphabétique”, alors que Harris et Coltheart (1986) et Seymour (1990, 1994) de “décodage phonologique”. Un aspect important de la théorie de Seymour est que la stratégie alphabétique ne succède pas nécessairement à la stratégie logographique. Les deux stratégies se développeraient plutôt en parallèle, en particulier si le code alphabétique est appris précocement.
Marsh et al. (1981) considèrent que cette étape comporte deux phases successives: une première étape de “décodage phonologique séquentiel” caractérisé par un traitement lettre par lettre, suivie d’une étape de “décodage phonologique hiérarchique” témoignant de la capacité de l’enfant à prendre en compte les règles contextuelles ainsi qu’à utiliser des processus de décodage par analogie.
Le modèle de Ehri (1992, 1998), qui distingue également deux phases au sein de cette étape, fournit une description plus détaillée que les autres modèles des processus permettant à l’enfant de “s’approprier le code”. Dans une première phase, dite “alphabétique partielle”, l’enfant utilise ses connaissances rudimentaires du nom ou du son des lettres pour former des connections partielles entre les mots écrits et leur prononciation. La lecture se base alors sur certains indices phonétiques des items (“phonetic cue reading”), par opposition au stade précédent où elle était basée sur des indices strictement visuels (“visual cue reading”). Puisque cette stratégie se base toujours sur la prise en considération d’indices partiels, elle mènera souvent l’enfant à produire des erreurs, comme man pour men, this pour that, ou horse pour house (Ehri & McCormick, 1998, p. 145). Dans une seconde phase, dite “alphabétique complète”, les connaissances des relations grapho-phonologiques se sont suffisamment développées pour permettre à l’enfant d’attribuer rapidement une prononciation à chacun des graphèmes constitutifs des mots rencontrés.

 

c) Troisième étape: la procédure orthographique

Au stade orthographique, les mots sont traités comme des unités. L’enfant a mémorisé dans sa mémoire à long terme des informations spécifiques sur les caractéristiques orthographiques des mots écrits qu’il a déjà rencontrés. Dans les modèles de Frith (1985), de Marsh et al. (1981) et en particulier de Seymour (1990, 1994), la stratégie orthographique résulterait de la “fusion” des deux stratégies qui se sont développées séparément au cours des deux stades antérieurs, et correspondrait approximativement à la voie d’adressage du modèle proposé par Coltheart (1978) pour les adultes. Elle se distingue néanmoins clairement de la stratégie logographique car elle ne se base plus sur des caractéristiques visuelles partielles mais sur des entrées lexicales spécifiques et complètes. Elle se distingue également de la stratégie alphabétique car elle n’implique plus (nécessairement) un recodage phonologique basé sur des unités sous-lexicales mais porte sur des unités de sens, idéalement les morphèmes. Selon Frith (1985), l’adoption de la stratégie orthographique résulterait de l’automatisation de la stratégie alphabétique et de l’inefficacité de celle-ci pour lire des mots irréguliers.

Ehri (1992, 1995, 1998) s’oppose fermement à l’idée selon laquelle, chez l’enfant ou chez l’adulte, l’identification des mots par la voie lexicale ne passe pas par une activation pré-lexicale des correspondances grapho-phonologiques (CGP). Cet auteur considère au contraire que la connaissance des correspondances entre graphèmes et phonèmes fonctionne comme un outil mnémonique qui permet de retenir des informations spécifiques sur les lettres de mots particuliers. Les représentations formées en mémoire à partir des expériences de lecture seraient donc alphabétiques et consisteraient en des graphèmes associés à des phonèmes. L’acquisition des représentations orthographiques implique une activation du système alphabétique, ainsi qu’un calcul de connexions entre graphèmes et phonèmes lors de la perception et de la lecture des mots. La répétition de ce processus associe l’orthographe d’un mot à sa prononciation et à sa signification en mémoire, formant un amalgame. Ce sont ces connexions graphophoniques non arbitraires, car dérivées des connaissances du système alphabétique, qui permettent à l’enfant (et à l’adulte) de représenter de plus en plus de mots de manière unique dans le lexique et de sélectionner automatiquement le candidat adéquat lors des rencontres ultérieures avec le mot écrit (Ehri, 1997, 1998, p. 17, voir aussi Perfetti, 1992; Plaut et al., 1996, pour une proposition similaire).

 

d) Le développement de l’écriture et ses relations avec la lecture

Par analogie au modèle à deux voies proposé pour rendre compte des processus intervenant dans l’identification de l’écrit par l’adulte, un modèle d’écriture à deux voies fait largement référence lorsqu’il s’agit de rendre compte des performances des scripteurs experts (e. g. Ellis & Young, 1988) ou débutants (e. g. Brown & Ellis, 1994; Frith, 1980; Perfetti, Rieben & Fayol, 1997). Ainsi, deux processus permettraient d’orthographier adéquatement les stimuli entendus: une voie d’adressage, qui rendrait compte de la capacité à orthographier correctement des mots présentant correspondances phonème-graphème (dans la suite, CPG) non prédictibles (e. g. femme), et une voie d’assemblage, qui rendrait compte de la capacité à orthographier adéquatement des pseudo-mots (e. g. tral(le) pour /tral/).

Comme le mentionne Ehri dans le titre de l’une de ses contributions (1997), “apprendre à lire et apprendre à orthographier, c’est la même chose, ou pratiquement la même chose”. Dans le modèle proposé par cet auteur, le développement de l’écriture se caractérise par une succession de quatre stades, plus ou moins analogues et plus ou moins contemporains à ceux qui ont été décrits pour le développement de la lecture. Il s’agit de l’écriture “pré-communicative” (équivalent de la lecture pré-alphabétique), l’écriture “semi-phonétique” (équivalent de la lecture alphabétique partielle), “phonétique ou phonémique” (équivalent de la lecture alphabétique consolidée) et de l’écriture “morphémique” (correspondant au stade morphémique).

Une idée originale du modèle proposé par Frith (1985, 1986) est que les stades de développement de la lecture et de l’écriture seraient temporellement dissociés: la lecture et l’écriture serviraient à tour de rôle de stimulateur (“pacemaker”) du développement de l’autre habileté. Différents niveaux d’expertise sont définis pour chaque procédure, et ce n’est qu’à partir d’un certain niveau de compétence dans l’utilisation d’une procédure que cette dernière est transférée à l’autre domaine. Pour Frith, la stratégie logographique se développerait d’abord en lecture puis serait transférée à l’écriture. Par contre, c’est dans le domaine de l’écriture que se développerait en premier lieu la procédure par médiation phonologique, qui est ensuite transférée en lecture. Cette progression rendrait compte des résultats montrant que des enfants d’âge préscolaire sont capables d’écrire des mots de façon phonétique tout en étant incapables de relire ultérieurement leurs propres productions (e. g. Bryant & Bradley, 1980; Frith, 1980; Read, 1986). Enfin, la procédure orthographique serait acquise d’abord en lecture avant d’être transférée à l’écriture.

 

2. Evaluation des modèles en stades

 
a) La fonction du stade logographique

La stratégie logographique joue un rôle important dans la dynamique développementale de certains modèles en stades (Frith, 1985; Seymour, 1990, 1994). En particulier, une caractéristique majeure du modèle de Seymour, dit “à double fondations”, est que les procédures logographique et phonologique participent conjointement à l’élaboration du lexique orthographique. Seymour et Elder (1986) ont tenté de caractériser la lecture logographique en examinant des enfants de première primaire (âgés de 4 ans 5 mois à 5 ans 5 mois) apprenant à lire selon une méthode strictement globale. Plusieurs éléments semblent indiquer que ces enfants ne recourent pas à une procédure phonologique pour identifier les mots écrits présentés dans des tâches de nomination. En particulier, ils ne montrent pas l’effet classique de longueur des mots, qui est supposé signer le caractère séquentiel du traitement effectué. De plus, la majorité des erreurs produites consistent soit à refuser de répondre, soit à fournir un mot visuellement proche de la cible ou un mot appris en classe. Les erreurs classiques qui témoignent de l’exploitation d’une procédure de décodage phonologique, par exemple les productions partielles ou les régularisations de mots irréguliers, ne sont pas observées. Selon Seymour et Elder, la stratégie logographique permettrait à l’enfant de constituer un lexique pouvant contenir plus de 100 mots.

Plusieurs autres études semblent cependant indiquer que la stratégie logographique est optionnelle plutôt qu’obligatoire (Scott & Ehri, 1989; Ehri & Wilce, 1985; Stuart & Coltheart, 1988). Plus précisément, ces études suggèrent que même avant d’avoir acquis des capacités de recodage phonologique élaborées, les enfants utilisent leurs connaissances rudimentaires de l’alphabet pour former des associations non arbitraires entre les mots écrits et leur prononciation. Par exemple, Ehri et Wilce (1985) ont appris à des enfants âgés de 4 à 6 ans à associer des épellations visuellement contrastées (e. g. “Fo” pour knee) ou phonétiques simplifiées (e. g. “NE” pour knee) à des mots. Les résultats montrent que seuls les enfants pré-lecteurs qui ne connaissent pas encore l’alphabet et sont incapables de lire un seul mot apprennent plus facilement les épellations visuellement contrastées que les épellations phonétiques simplifiées, alors que l’inverse est observé parmi les enfants qui connaissent au moins quelques lettres et peuvent lire au moins quelques mots. Selon les auteurs, ces résultats montrent que l’enfant exploite des indices phonétiques pour reconnaître les mots dès qu’il commence à apprendre l’alphabet.

Remarquons cependant que l’avantage observé pour les épellations phonétiques pourrait résulter du fait que toutes les lettres constitutives de ces items font également partie des épellations conventionnelles des mots auxquels elles sont associées, alors qu’aucune lettre des items visuellement contrastés n’appartient aux mots qu’ils représentent. Les enfants pouvant déjà lire quelques mots pourraient dès lors trouver les épellations phonétiques simplifiées plus familières que les épellations visuellement contrastées. Afin de vérifier cette éventualité, Rack, Hulme, Snowling et Wightman (1994) ont comparé les performances d’apprentissage de deux types d’épellations qui ne diffèrent que par une lettre chez des enfants de troisième maternelle connaissant la plupart des lettres de l’alphabet et pouvant lire quelques mots. Les résultats montrent que ces enfants apprennent plus rapidement les épellations comportant une lettre qui ne diffère de la lettre cible que par le trait de voisement (e. g. TPL pour table, KDN pour garden) que les épellations comportant une lettre phonétiquement plus distante de la lettre cible (e. g. TGL pour table, BDN pour garden). Ces résultats corroborent la notion de lecture sur base d’indices phonétiques (“phonetic cues reading”) proposée par Ehri (1992, 1998; Ehri & Wilce, 1985).

De manière générale, l’idée selon laquelle la procédure logographique joue un rôle dans le développement des habiletés de lecture est difficile à maintenir (e. g. Alegria, Leybaert et Mousty, 1994). Comme le mentionnent Alegria et al., cette procédure se distingue radicalement de celles qui vont suivre par deux aspects: elle n’est pas générative (elle ne permet pas d’identifier des mots qui n’ont jamais été rencontrés auparavant) et elle n’inclut aucune référence à la parole au niveau sub-morphémique (aucun lien n’est établi entre des parties de la forme écrite des mots et des parties de leur forme orale). Plusieurs études montrent par ailleurs que les capacités de “lecture” logographique ne sont pas corrélées avec les capacités de recodage phonologique (e. g. Jorm, 1981; Masonheimer et al., 1984). Dès lors, il est difficile de considérer comment une procédure qui ne semble pas liée aux suivantes (Masonheimer et al., 1984), qui ne se manifeste que chez certains enfants (Stuart & Coltheart, 1988), et ceci seulement dans certaines langues (voir infra, section 1.2.5.1.), puisse constituer un stade développemental au sens strict.

Ehri (1992; Ehri et Wilce, 1985; Ehri & Sweet, 1991) rejette également la notion de stade logographique telle que définie par Frith (1985). Elle soutient néanmoins l’idée selon laquelle l’enfant passerait par un stade développemental au cours duquel l’identification des mots se ferait sur base d’indices partiels, avant de développer des capacités de recodage phonologique et d’assemblage suffisantes pour entrer dans le stade phonologique. En effet, l’enfant ne traite qu’une, voire deux, lettre(s) des mots présentés (e. g. il réalisera que “b” se prononce /b/ en étant confronté à “beak”), ce qui le mènera à produire de nombreuses erreurs (e. g. lire “beak” pour tous les mots qui commencent par “b”). Rappelons que pour Ehri, l’entrée dans le stade phonétique partiel exige une connaissance de quelques correspondances graphème-phonème, ainsi qu’une forme de conscience phonémique rudimentaire et des capacités à utiliser les informations contextuelles pour générer une prononciation adéquate à partir des indices partiels traités.

 

b) La succession des stades phonologique et orthographique

La dynamique développementale envisagée dans les modèles en stades (voir surtout Marsh et al., 1981; Frith, 1985) implique qu’au début de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, l’enfant prononce les mots écrits au moyen d’un processus séquentiel de conversion des graphèmes en phonèmes (assemblage phonologique), pour ensuite abandonner cette procédure au profit d’une stratégie orthographique (adressage lexical).

Certaines études transversales comparant les performances en lecture d’enfants d’âges différents suggèrent effectivement que les lecteurs plus âgés exploitent plutôt une stratégie orthographique de lecture, alors que les lecteurs plus jeunes ou moins performants recourent à la médiation phonologique (e. g. Backman, Bruck, Herbert & Seidenberg, 1984; Doctor & Coltheart, 1980; Reitsma, 1984; Seidenberg, Waters, Bernes & Tannenhaus, 1984; pour une revue, voir Barron, 1986). Par exemple, Backman et al. ont examiné les stratégies de lecture de mots réguliers et irréguliers, ainsi que de pseudo-mots, chez des bons lecteurs de deuxième et quatrième primaire ainsi que chez des mauvais lecteurs de troisième et quatrième primaire. Les résultats montrent que les bons lecteurs plus jeunes et les lecteurs moins compétents plus âgés sont plus enclins que les bons lecteurs plus âgés à employer la médiation phonologique (plus d’erreurs de régularisation), même s’ils appliquent cette procédure avec moins de succès que les derniers (taux d’erreurs global plus élevé). Dans la même lignée, Seidenberg et al. ont montré que des enfants de deuxième primaire ont plus de difficultés à lire les mots irréguliers que les mots réguliers quelle que soit leur fréquence, alors que des enfants de sixième primaire ne montrent un effet de régularité que pour les mots rares. Cette interaction entre la fréquence et la régularité est typiquement celle observée chez les adultes (voir Seidenberg, 1985).

Ces derniers résultats contrastent avec ceux de Masterson, Laxon et Stuart (1992) qui rapportent que des enfants de deuxième primaire ne semblent pas montrer d’effet de régularité pour les primaire certains enfants semblent identifier certains mots écrits en recourant à une procédure d’accès lexical (e. g. Bradley & Bryant, 1985; Kimura & Bryant, 1983).

Pour rendre compte de ces résultats apparemment contradictoires, Share (1995) relève le fait que les études montrant que les jeunes lecteurs ont recours à une procédure d’adressage comportaient des listes d’items peu nombreux et de très haute fréquence, alors que les études montrant que l’adressage intervenait uniquement chez les lecteurs plus âgés comportaient des mots non familiers de basse fréquence ou des pseudo-mots. Or, d’autres études ont montré que quelques expositions à des mots nouveaux suffisent pour que des enfants de deuxième année retiennent les informations orthographiques spécifiques (e. g. Manis, 1985; Reitsma, 1983). On peut concevoir dés lors que certains mots de très haute fréquence peuvent être traités par voie lexicale dès les premiers stades d’acquisition de la lecture. Il semble donc que la procédure d’adressage intervienne bien plus tôt dans le développement que ne le décrivent la plupart des modèles en stades (voir en particulier Frith, 1985). Par ailleurs, l’exploitation d’une procédure d’adressage chez les lecteurs plus âgés semble ne pas exclure l’intervention du traitement par médiation phonologique. Nous reviendrons de manière plus détaillée sur ces considérations à la section 1.2.2.

 

c) La relation entre les procédures utilisées en lecture et en écriture

L’idée selon laquelle le développement de la lecture et de l’écriture dépendent de l’acquisition de connaissances similaires et mettent en œuvre les mêmes processus développementaux est corroborée par plusieurs études ayant montré des corrélations élevées entre les performances de lecture et d’écriture à différents moments du développement (e. g. Juel, 1988; Stage & Wagner, 1992). Foorman et collaborateurs ont par ailleurs observé les mêmes effets de régularité dans les deux modalités chez des jeunes lecteurs/scripteurs de deuxième primaire (Foorman, Jenkins & Francis, 1993; Foorman, Francis, Novy, & Liberman, 1991). De même, les études dans lesquelles des sous-groupes de “bons” et de “mauvais” lecteurs/scripteurs ont été isolés montrent que les seconds présentent des connaissances plus faibles que les premiers à la fois en lecture (connaissances de CGP) et en écriture (connaissance des CPG, e. g. Waters, Bruck & Seidenberg, 1985; Bruck & Waters, 1988; 1990).

Il faut ajouter que cette tendance générale n’est pas systématique, puisque certains enfants bon lecteurs sont néanmoins de mauvais scripteurs (e. g. Frith, 1980; Bruck & Waters, 1990). Un tel patron de performances n’est cependant pas étonnant lorsque l’on prend en considération les caractéristiques qui différencient ces deux activités. En effet, la lecture implique la reconnaissance d’éléments présents et cette reconnaissance peut éventuellement se faire sur base d’indices partiels, alors que l’écriture implique le rappel d’une connaissance stockée en mémoire et cette connaissance doit être détaillée pour permettre de fournir la réponse correcte (e. g. Frith, 1985).

Les résultats d’études visant à estimer la rapidité d’acquisition des représentations orthographiques en lecture et en écriture illustrent d’ailleurs assez bien cette asymétrie. En néerlandais par exemple, alors que seulement quatre expositions semblent être suffisantes pour que des enfants de deuxième primaire acquièrent des informations orthographiques spécifiques aux stimuli présentés (Reitsma, 1983), au moins neuf expositions semblent être nécessaires pour induire (chez des enfants de fin de première primaire) des effets bénéfiques sur l’écriture (Bosman & De Groot, 1991, 1992). Cette asymétrie est probablement d’autant plus forte lorsque les CGP sont plus prédictibles que les CPG, comme c’est le cas par exemple en français. En début d’apprentissage, un enfant francophone qui sait que les graphèmes “in” et “ain” correspondent au phonème /∑/ pourra lire des mots comme “matin” et “demain”, mais produira probablement une erreur en écrivant le second mot (“demin” au lieu de “demain”). Alegria et Mousty (1996) ont en effet montré que les enfants francophones semblent aborder l’écriture en exploitant un ensemble restreint de règles de correspondances dominantes. Ces règles sont probablement acquises de manière explicite plutôt que par l’expérience de lecture, car en début de développement leur utilisation ne semble pas être influencée par les propriétés statistiques du système orthographique ni par la fréquence des mots qui les comportent. Enfin, l’écriture est également rendue plus difficile que la lecture dans les langues dans lesquelles les structures suprasegmentales affectent la qualité des informations segmentales, comme l’anglais. Treiman, Berch et Weatherston (1993) ont montré que dans des tâches d’écriture de pseudo-mots, des enfants de première primaire commettaient plus d’erreurs (substitutions et omissions) pour écrire les voyelles et les consonnes de syllabes non-accentuées (mais comportant des voyelles pleines) que pour écrire les segments constitutifs de syllabes accentuées (voir aussi Kreiner & Gough, 1990, pour des effets similaires dans des tâches d’écriture de mots chez des adultes anglophones).

L’ensemble de ces résultats est compatible avec l’idée suivant laquelle les représentations orthographiques sont d’abord acquises en lecture avant d’être transférées à l’écriture. Des études menées par Cunningham et Stanovich (1990, 1993) supportent plus directement encore cette notion. Ces auteurs ont en effet montré que la quantité de lecture effectuée par des enfants de première, deuxième et troisième primaire rendait compte d’une part importante de la variance en connaissances orthographiques, mesurées au moyen de tâches d’écriture, et ceci même lorsque la capacité de traitement phonologique était contrôlée. Ce résultat suggère que l’exposition aux mots en lecture conduit effectivement l’enfant à développer des représentations orthographiques qui sont ensuite utilisées en écriture. Il convient par ailleurs d’ajouter que, contrairement aux prédictions que l’on pourrait dériver de la plupart des modèles en stades (e. g. Frith, 1985; Marsh et al., 1981) les enfants sont sensibles à des régularités orthographiques générales comme la fréquence et la position légale des doubles consonnes dès les premiers stades d’acquisition (e. g. Treiman, 1993; Cassar & Treiman, 1997; Pacton & Fayol, 2000; Pacton Perruchet, Fayol & Cleeremans, 2001).

 

3. Conclusion: la notion de développement en stades

Les modèles en stades ont suscité de très nombreuses recherches, probablement en raison du fait que la caractérisation du développement en stades successifs définis par un mode de traitement particulier se prête facilement à la démarche expérimentale car elle permet de formuler des prédictions précises concernant les procédures de traitement supposées être exploitées à chaque stade du développement (Share & Stanovich, 1995).

La caractérisation d’une acquisition en stades, telle qu’envisagée par certains auteurs (voir surtout Frith, 1985; Marsh et al., 1981) fait cependant peser des contraintes très fortes sur la modélisation (Sprenger-Charolles & Casalis, 1996). Elle implique en effet que l’ordre des stades successifs soit fixe et identique pour tous les sujets, qu’aucun stade ne puisse être évité, puisque le passage à chaque stade ultérieur résulte de la maîtrise de compétences acquises au stade précédent, que les comportements au sein de chaque stade soient homogènes, et que l’évolution se caractérise par des changements qualitatifs, puisque la procédure de traitement diffère radicalement d’un stade à l’autre.

Les résultats rapportés dans les sections précédentes montrent clairement que le développement de la lecture et de l’écriture ne peut se caractériser strictement en ces termes. Un problème corollaire de la modélisation en stades réside dans son caractère descriptif: les facteurs intervenant dans le passage d’un stade à l’autre ne sont généralement pas suffisamment spécifiés pour rendre compte de la dynamique du développement, alors que cet aspect constitue le but principal d’un modèle développemental. Comme nous le verrons à la section suivante, les résultats de plusieurs études longitudinales ont permis de formuler des propositions plus précises concernant les processus intervenant dans la construction progressive du lexique orthographique.

 

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Au-delà de l’identification des mots

Le développement de mécanismes d’identification des mots suffisamment automatisés est une condition essentielle et nécessaire à la compréhension des phrases et des textes, mais non suffisante.

Nous lisons pour comprendre ; mais, en fait, la compréhension est une habileté très complexe impliquant l’intégration d’un grand nombre de processus ainsi que la capacité à ajuster les stratégies de traitement durant la lecture.

Dans une large revue de la littérature scientifique tenant compte d’un grand nombre d’études menées entre 1980 et 2000 sur le développement de la compréhension de la langue écrite, les experts du National Reading Panel (NRP), Etats-Unis, ont identifié trois facteurs importants dans le développement de la compréhension du langage écrit :

La compréhension du langage écrit ne peut être envisagée sans examiner le rôle critique de l’apprentissage et du développement du vocabulaire. La compréhension du langage écrit est la construction du sens des textes écrits au travers d’un échange réciproque d’idées entre le lecteur et le message, c’est-à-dire un processus intentionnel de raisonnement analogue à la résolution d’un problème. La compréhension du langage écrit passe par la mise en place de discussions au cours desquelles les élèves collaborent pour construire des interprétations communes des textes et discutent explicitement des processus mentaux et des stratégies cognitives impliquées dans la compréhension.

Nous discuterons des implications éducationnelles de ces trois facteurs pour l’amélioration des habiletés de compréhension dans la Section 3.