3.4 Habiletés faibles

Développer la mémoire, la concentration et l’organisation

Dans la Section 1, nous avons précisé que les dyslexiques présentaient fréquemment des difficultés de mémoire, de concentration et d’organisation spatiale et temporelle. Voici quelques conseils pour les aider par rapport à ces habiletés.

Pour la mémoire

Comme déjà mentionné, l’encodage multisensoriel peut aider les élèves à mieux comprendre. Dans ce cadre, nous avons déjà mentionné les techniques de visualisation, et l’utilisation de cartes heuristiques, afin de faciliter la compréhension et la production de textes écrits.

Ces outils favorisent également la rétention et la restitution, et peuvent être utilisés pour diverses matières (français, histoire, géographie, sciences, etc.), dans différents buts (retenir une leçon, résumer une matière pour un test), et pour tous les élèves.

De manière plus générale, plusieurs experts de renommée internationale, comme Tony Buzan et Christine Carter, proposent de sensibiliser les élèves et de les entraîner à l’encodage multisensoriel au moyen d’exercices comme le suivant :

« Imaginez un de vos endroits favoris que vous connaissez bien… »

i. Entrée visuelle
« Voyez cet endroit dans votre esprit…SOYEZ dans cet endroit. Comment est la clarté de cet endroit dans votre esprit ? Quelles couleurs voyez-vous ? Est-ce comme une photo excellente ? »

ii. Entrée auditive
« Pouvez-vous utiliser votre imagination pour entendre les sons associés à cet endroit ? Le son du vent soulevant les feuilles d’arbre ou les vagues se brisant sur la rive ? Les sons sont-ils clairs ? Sont-ils une partie essentielle de la scène ? »

iii. Entrée tactile
« Touchez quelque chose dans votre endroit imaginaire ; SENTEZ un objet. Pouvez-vous en ressentir la texture, la température, la brise sur votre peau ? »

iv. Odeur
« Retournez dans cet endroit dans votre esprit, et amenez-y les odeurs associées (ex. fumée, parfum ou brise iodée de la mer). Est-ce que ces odeurs développent l’atmosphère de l’endroit ? »

v. Goût
« Pouvez-vous goûter le sel dans votre bouche ? Si vous vous imaginez manger dans cet endroit, pouvez-vous visualiser la nourriture et est-ce que vous salivez ? »

Concrètement, vous pouvez entraîner vos élèves dyslexiques (et les autres) à coder les informations au moyen du plus grand nombre possible de modalités sensorielles, d’une part en effectuant avec eux des exercices tels que celui proposé ci-dessus, mais également et surtout en rendant vos leçons aussi « multisensorielles » que possible. Ainsi, utilisez des transparents, des films, des vidéos, des diagrammes, des images numériques, des tableaux, des photos, des objets manipulables, etc., pour illustrer les sujets abordés.

Par ailleurs, gardez à l’esprit que la mise en rapport de différents sujets, la déduction de règles ou la généralisation sont des opérations difficiles pour les élèves dyslexiques, et que pour les faciliter, il faut faire des liens explicites aussi souvent que possible (apprentissage direct), afin de faciliter la mémorisation.

Ainsi, commencez chaque leçon en rappelant ce qui a été vu à la leçon précédente et en présentant un aperçu des sujets qui seront couverts dans cette leçon, et liez explicitement le contenu de la leçon à ce qui a déjà été vu et/ou à l’expérience personnelle des élèves. Un outil qui pourrait permettre de faciliter la mise en relation explicite des choses est un cahier ou un agenda, dans lequel l’élève pourrait écrire ces liens.

Un autre principe central prodigué par plusieurs méthodes multisensorielles afin de faciliter la mémorisation est la notion de « surapprentissage » (« overlearning »), qui ne consiste pas simplement à répéter plusieurs fois les choses, mais à les répéter de différentes manières. En d’autres mots, cela consiste à dire ce que l’on va dire, puis le dire, puis rappeler ce que l’on vient de dire ; à chaque fois en d’autres mots. Puis, rappeler ce que l’on a dit la veille le lendemain, puis le surlendemain, puis deux jours après, puis une semaine après, puis un mois après.

ACTIVITE 21

N’oubliez jamais que les élèves dyslexiques devront faire plus d’efforts, et prendront généralement plus de temps, que leurs pairs non dyslexiques. Par conséquent, ils seront épuisés plus rapidement que les autres, et seront parfois incapables de suivre le rythme de la classe et de prendre des notes complètes tout en vous écoutant.

Avec votre partenaire de cours, tentez de trouver au moins cinq moyens pour aider les élèves dyslexiques à pouvoir suivre plus facilement le rythme de la classe et disposer de notes complètes. Comparez vos réponses avec nos quelques suggestions.

Vous pouvez les aider par des moyens très simples comme:

  • – Ralentir votre débit quand vous abordez des sujets complexes ;
  • – Diviser la matière d’une leçon en petites parties ;
  • – Lire lentement à haute voix les consignes pour les activités à faire ;
  • – Donner seulement une instruction à la fois ;
  • – Effectuer des pauses occasionnelles dans l’exposé (des moments de « respiration ») pour permettre aux élèves de vous rattraper ;
  • – Interrompre la leçon par de courtes séances de questions-réponses sur ce qui vient d’être dit ;
  • – Lorsque c’est possible, demander aux élèves dyslexiques de répéter en leurs propres mots ce qui a été dit ;
  • – Laisser les notes au tableau aussi longtemps que possible, et marquer les mots-clés clairement (couleur, soulignage) ;
  • – Donner aux élèves dyslexiques un plan avant la leçon, et des notes sur cette leçon, et laisser ces élèves utiliser les moyens qui leur permettront de compléter des notes lacunaires (notes d’un autre élève, permission de vous enregistrer, utilisation d’un ordinateur pour prendre des notes, etc.) ;
  • – Créer des cartes-résumés à la fin de chaque sujet vu en classe.

ACTIVITE 22

Dressez avec votre partenaire de cours une liste de questions que l’enseignant pourrait se poser à l’issue d’une leçon afin de déterminer si elle était adaptée aux élèves dyslexiques.

Wendy Goldup propose la liste de questions suivantes, qui « non seulement sauveront la vie du (des) étudiant(s) dyslexique(s), mais aideront tous les étudiants » (p. 325) :

  • – Est-ce que ma présentation incorporait des stratégies visuelles, auditives et kinesthésiques ? Dans ce cas, l’élève dyslexique peut-il me voir et m’entendre, et a-t-il un crayon bien taillé ?
  • – Ai-je divisé la matière en composantes plus petites pour faciliter la compréhension ?
  • – Ai-je fait le lien avec de la matière connue ou de l’expérience personnelle ?
  • – Ai-je répété la matière de diverses manières ?
  • – Puis-je résumer les points principaux dans un ordre logique, en utilisant un vocabulaire restreint ?
  • – Est-ce que l’étudiant peut me dire ce qu’il/elle a à faire ?
  • – Lui ai-je donné un « aide-mémoire » qui lui permet d’accéder à la leçon ?
  • – Est-ce que l’orthographe des mots principaux est accessible ?
  • – Lui ai-je permis d’enregistrer son travail de manière appropriée ?
  • – Ai-je prodigué une aide discrète mais efficace ?
  • – Puis-je évaluer son travail de manière positive ?
  • – Avons-nous tous eu du plaisir ?

Enfin, soyez conscient du fait que la plupart des élèves pourront restituer les informations apprises au travers des leçons et des devoirs en une seule tâche : les dire ou les écrire, à peu près dans les mêmes mots que lorsque ces informations ont été mémorisées. Ceci n’est pas le cas pour la plupart des élèves dyslexiques, qui devront effectuer non pas une, mais deux tâches, afin de pouvoir restituer la matière. D’abord, ils devront pouvoir exprimer la matière dans leurs propres mots pour la mémoriser adéquatement (le « par cœur » est souvent impossible pour eux). Ensuite, ils devront pouvoir exprimer leurs connaissances par écrit, car c’est généralement la modalité selon laquelle ils seront examinés (et avec laquelle ils ont le plus de difficultés).

Dès lors, il est essentiel de guider clairement ces élèves à propos de ce qu’ils doivent connaître pour les examens, et de s’assurer qu’ils aient des notes complètes. Idéalement, vous pourriez leur donner à l’avance des questions à étudier pour l’examen, ainsi que des réponses, pour qu’ils aient une idée du type de questions et du type de réponses à fournir.

Il existe aussi des activités spécifiques qui peuvent être utilisées dans la classe pour développer la mémoire à court terme auditive ou visuelle.

Pour améliorer la mémoire à court terme auditive vous pouvez demander à l’élève de retenir des informations verbales pendant un certain temps tout en effectuant une autre tâche.

Par exemple, lorsque vous travaillez avec l’alphabet en bois, vous pouvez donner une série de lettres à mémoriser. Vous demandez ensuite à l’élève de compter jusque 10 ou de compter de 10 à 1 avant de rappeler la série de lettres. Vous pouvez répéter cette activité avec un nombre croissant de lettres à rappeler.

D’autres activités impliquent la mémorisation d’une liste croissante d’items, par exemple une liste de course (« je suis allé au magasin et j’ai acheté…»), une liste d’animaux (« je suis allé au zoo et j’ai vu…»), une liste de sports (« je suis allé aux Jeux Olympiques et j’ai vu…»).

Pour améliorer la mémoire à court terme visuelle, des activités qui impliquent la mémorisation d’un nombre croissant d’objets disposés sur une table ou sur un dessin peuvent être utilisées.

Pour en savoir plus sur les activités qui améliorent la mémoire à court terme, nous vous conseillons de consulter les ouvrages écrits par Tony Buzan sur ce sujet.